15 Erreurs qui te Desservent
Si je devais recommencer ma vie, je ferais les mêmes erreurs, mais plus tôt.
Groucho Marx.
Tu t’en doutes, il y a quelques erreurs à ne pas commettre si tu veux arriver à tes fins, quinze erreurs qui peuvent ruiner tous tes efforts. Mieux vaut les connaître pour ne pas faire un lamentable flop.
En cumulant les erreurs, tu prends le risque de fragiliser l’impact de ton ouverture. À cause de ces impairs, tu pourrais annuler l’effet de surprise et perdre un temps précieux. Malheureusement, toutes ces erreurs ne pourraient pas être rattrapées par la suite.
Tu t’étonneras peut-être de certaines recommandations données à rebours des règles de politesse les plus élémentaires. Car c’est l’accomplissement des quatre missions qui comptent. Et leur mise en œuvre n’est pas toujours compatible avec la politesse telle qu’on l’entend au quotidien : bonjour, s’il vous plaît, merci, etc.
En limitant les erreurs, tu mets toutes les chances de ton côté. Reviens dans ce chapitre autant que tu veux pour apprendre à t’empêcher naturellement de les faire.
Après chaque discours, viens relire la liste des erreurs à éviter, évalue objectivement ton niveau de conformité à ces consignes et note tes progrès.
Après chaque discours, viens relire la liste des erreurs à éviter, évalue objectivement ton niveau de conformité à ces consignes et note tes progrès.
1. Ne pas faire d’ouverture
La première erreur à ne pas faire, tu t’en doutes, serait de ne pas prévoir d’ouverture.
La nature ayant horreur du vide, en l’absence d’ouverture, ce sont les premiers mots que l’orateur prononcera, ceux de son développement peut-être, qui feraient office d’ouverture. Il y a fort à parier qu’ils ne rempliraient pas correctement les quatre missions.
Tout le discours s’en trouverait déséquilibré. Et l’objectif ne serait sûrement pas atteint au bout du compte, personne quasiment n’ayant accroché au début.
Notes
- « Mais aujourd’hui on croit que tout ce qu’on dit en commençant est un vrai commencement, et que la première pensée venue, surtout si c’est une pensée qui flatte, est un exorde. » Quintilien, Institution oratoire, livre IV, chap. I.
2. Ne suivre aucun conseil
La deuxième erreur est, elle aussi, évidente. Mais je ne résiste pas à l’envie de la mentionner quand même.
Je le dis sans ambages : ce serait une erreur monumentale de ne suivre aucun des conseils présents dans cet ouvrage. Ils ne sont peut-être pas tous adaptés à ta situation. Mais tu en trouveras bien un qui élèvera tes discours à un niveau supérieur.
Les notions de missions à remplir et de besoins à satisfaire, notamment, sont des éléments qu’il est primordial d’intégrer dans la conception de tes ouvertures de discours, si tu recherches avec sincérité l’adhésion du public.
3. Montrer de l’hésitation
Si tu montres de l’hésitation, le public l’interprétera comme un manque de préparation ou comme un manque d’assurance.
Dans les deux cas, sa confiance en toi ne sera peut-être pas à son niveau optimal pour une écoute de qualité. Ce qui te rendra encore plus mal à l’aise. Et finalement, tout le monde sera mal à l’aise.
L’hésitation peut être marquée par des phrases non terminées, des termes imprécis, une expression confuse, des « euh… », des mots-béquilles en abondance : « alors… voilà… »
Réduis ces hésitations handicapantes grâce à une préparation méticuleuse et à l’aide de certains des conseils prodigués dans le chapitre suivant : rédaction, apprentissage, respiration, ancrage, etc.
4. Redonner le titre
Si l’événement dans lequel s’inscrit ta conférence est bien organisé, le titre figure sur le programme. Et il est normalement prévu que le maître de cérémonie le mentionne lorsqu’il te présente au public.
En le répétant, en fournissant une information déjà connue de tous, tu perds de précieuses secondes ; et surtout, tu perds en impact.
À toi de t’assurer au préalable que le maître de cérémonie ou le présentateur a bien pris connaissance de ton titre et qu’il l’annoncera correctement juste avant ton intervention.
5. Dire bonjour
Ne dis surtout pas bonjour ! Ou « Bonsoir à tous ! » Le temps de dire « Madame la Présidente, chers membres, mesdames et messieurs les invités, bonsoir. », tu as déjà perdu dix secondes irrattrapables et surtout tu as ruiné ton entrée.
Personne ne te reprochera d’être impoli si tu fais l’impasse sur les salamalecs. Au contraire, tout le monde te saura gré de rentrer rapidement dans le vif du sujet.
Tu donneras l’impression de quelqu’un de dynamique qui sait où il va et qui ne cherche pas à se donner confiance en bredouillant quelques maladroites salutations.
6. Se présenter
Ne te présente pas ! Jamais ! Ta biographie figure probablement sur le programme de l’événement. Et si ce n’est pas le cas, de toute façon, le maître de cérémonie l’aura évoquée avant ton arrivée sur scène. Ton C.V. est donc déjà connu du public.
Le temps que tu dises ton nom, ton titre, ce que tu as fait, pourquoi tu es là, gnagnagna… une bonne partie de l’auditoire a déjà décroché ou n’a pas encore accroché et n’accrochera jamais.
Le pire ce sont les formules qui n’ont absolument aucun sens comme : « Pour ceux qui me connaissent pas [sic], je m’appelle Bernard. » Parce que, qu’on se le dise, pour ceux qui te connaissent, tu t’appelles aussi Bernard !
7. S’excuser
Encore un coup de canif dans les règles de politesse : ne t’excuse pas ! En t’excusant, par exemple, de ne pas porter de cravate ou de tailleur, tu attires l’attention sur un détail que sans doute personne n’aurait remarqué.
Assume ce que tu es et ce que tu fais. Ne t’excuse jamais, jamais, jamais ! Même pas d’être en retard et surtout pas d’être là !
En t’excusant, tu n’attireras pas forcément la sympathie, mais tu es sûr de perdre de ton autorité. Difficile de prendre la scène dans ces conditions.
Quoi qu’il arrive, laisse à penser que tu maîtrises la situation, que tout est calculé. Selon la formule de Jean Cocteau : « Puisque ces mystères me dépassent, feignons d’en être l’organisateur. »
Notes
- Jean Cocteau, Les mariés de la Tour Eiffel, 1921.
8. Démarrer en trombe
Autre erreur courante : démarrer son discours avant même de s’être arrêté au milieu de la scène.
D’une part, tu risques de ne pas te faire entendre. Car tes premiers mots seront couverts par tes pas, par les craquements de l’estrade ou par les derniers vestiges du brouhaha de la foule avant qu’elle comprenne confusément que tu as déjà commencé à parler.
D’autre part, cette précipitation associée au stress t’expose à une notable asphyxie dont toute ton ouverture, et peut-être même une partie de ton développement, pourrait pâtir. Asphyxie veut dire cerveau moins bien oxygéné et donc moins bonne clarté d’esprit.
Ajoutons qu’en démarrant en trombe, on montre de façon subliminale le peu de confiance que l’on a dans son message. On indique que ce que l’on va dire ne vaut pas vraiment la peine d’être entendu.
9. Mentionner la préparation
« Pour préparer cette conférence, il m’a fallu trois ramettes de papier, cinq litres de café et deux boîtes d’anxiolytique. »… Au secours !
En fait, tout le monde s’en moque bien. Personne n’a envie de savoir les difficultés que tu as rencontrées pour trouver un sujet, les errances que tu as connues pour rédiger ton discours et les problèmes qui se sont présentés pour organiser cette intervention.
Que dirais-tu si avant de danser, une ballerine venait t’expliquer combien de chaussons elle a usés, combien d’entorses elle s’est faites, combien de tubes de crème pour les pieds elle a utilisés ?
Dans le même registre, évite de dresser la liste de tous les discours auxquels le public a échappé : « Au début, je voulais vous parler de… Et puis je me suis dit… D’un autre côté, ça aurait eu du sens d’évoquer… Finalement, j’ai choisi de vous parler de… » Ne commence pas par un bêtisier. Reste centré sur ton sujet.
Les gens sont venus pour écouter une conférence, pas pour t’entendre geindre, ni même pour te féliciter d’avoir réussi à monter l’événement malgré tout ce qui t’est arrivé.
10. Être ennuyeux
Être ennuyeux est formellement interdit aux conférenciers. Et pourtant, il y a des contraventions qui se perdent.
Les gens ne sont pas là pour faire la sieste ou gérer leurs emails. Écris-le en gros sur ton cahier de conférencier : « Défense d’être ennuyeux ! ». Si tu préfères, utilise le mot en six lettres qui commence par « C » et finit par « hiant ».
Si tu es ennuyeux au début, tes auditeurs supposeront que tu le seras tout au long du discours et décrocheront rapidement pour s’éviter un supplice.
Ils ne déploieront aucun effort pour te suivre. Et même si tu dis des choses intéressantes plus tard, ils ne pourront plus raccrocher. Ce sera trop tard : ils auront perdu le fil.
Au fur et à mesure que tu sentiras l’ennui gagner la salle, toi-même sombreras dans le malaise, incapable de remonter la pente. Tu seras seul ! Désespérément.
11. Débiter des banalités
Si tu débites des banalités en ouverture de ton discours, des choses que tout le monde sait déjà, tu laisses penser à tes auditeurs qu’ils n’apprendront strictement rien en t’écoutant jusqu’à la fin.
Pour cette raison, ils abandonneront sur le champ, te laissant à ton interminable monologue. Enfoncer des portes ouvertes est une erreur fatale. Exemple de banalités : « Le monde change… Nous sommes de plus en plus nombreux sur Terre… Les voitures vont de plus en plus vite… ».
Penses-tu qu’il soit possible de surprendre ou d’apprendre quelque chose aux gens en disant de telles platitudes ? C’est un manque de respect d’avoir demandé à des gens de venir pour entendre ça.
À la limite, les gens veulent bien se déplacer pour recevoir des informations déjà connues, mais il faut qu’elles soient présentées de façon originale, sous un éclairage différent. Dire que la population mondiale augmente est une banalité. Dire qu’elle est passée de 1,6 milliard en 1900 à 7,8 milliards en 2020 est une information frappante. Dire que nous tous vivants aujourd’hui représentons quasiment un dixième de toute l’humanité venue sur terre depuis la nuit des temps donne le vertige.
Si le fond est banal, la forme doit être originale. Si les deux sont usés, le public est blasé.
Notes
- Les plus anciens fossiles d’Homo Sapiens datent d’il y a 300 000 ans.
12. Improviser
Improviser. Sauf quand on n’a pas le choix (mais c’est rare), voilà bien l’une des pires choses à faire dans le cadre d’une ouverture.
Même si tu es un adepte des discours improvisés, il est primordial de verrouiller scrupuleusement l’ouverture (le finale aussi d’ailleurs).
Improvisation en ouverture veut dire le plus souvent : hésitations, flou, structure fragile, manque de stratégie, défaut de logique, missions ratées, vocabulaire pauvre, absence de confiance, et j’en passe.
Plus le temps de ton intervention est court, plus improviser apparaît comme la moins bonne option pour délivrer un message puissant en peu de temps.
Même s’il est réduit, tu auras toujours le temps de créer dans ta tête quatre phrases suivant la grille A.C.I.S. pour éviter l’improvisation totale. Profite, pour composer, du temps qu’il te faut pour aller de ta place à l’endroit où tu prendras la parole. (En prévision, assieds-toi toujours au fond !)
Notes
- « Se troubler, manquer de mémoire, ou demeurer court, produit là, plus qu’ailleurs, un fâcheux effet : un exorde vicieux ressemble à un visage balafré ; et il n’y a certainement qu’un mauvais pilote qui fasse naufrage en sortant du port. » Quintilien, Institution oratoire, livre IV, chap. 1.
13. S’éterniser
Une ouverture est une ouverture, un bref espace entre l’extérieur et l’intérieur. Ce n’est pas un long corridor dans lequel on s’éternise devant chaque tableau, où l’on se pose à chaque banc.
Entre rapidement dans le vif du sujet, dans la salle principale. Et referme la porte pour entamer le festin.
Lorsque l’auditeur se dit : « Quand est-ce qu’il commence ? », c’est que l’ennui le guette, que son attention s’émousse et qu’il est sur le point d’abandonner.
Il faut savoir mettre un terme à l’ouverture pour passer à ces points que l’auditoire est venu entendre de ta bouche.
Notes
- « Il faut le proportionner [l’exorde] au sujet, comme un vestibule et un portique aux palais et aux temples auxquels ils servent d’entrée. » Cicéron, Les trois dialogues de l’orateur, livre II, chap. LXXIX.
14. Remercier
À moins que tu ne sois récipiendaire d’un prix quelconque, fais l’impasse sur l’ennuyeuse série des remerciements. D’autant plus que tu as toutes les chances d’oublier quelqu’un qui ne te le pardonnera pas, même si tu prends soin de préciser : « Pardon à tous ceux que j’ai pu oublier. »
Encore une fois, au risque de paraître impoli – mais il n’en sera rien, je te l’assure – attaque ton discours comme une Formule 1 quitte la grille de départ.
Si l’occasion impose absolument une salve de remerciements, place plutôt ce moment après les applaudissements qui suivront ton discours (je te le souhaite) ou au début de la séance de questions-réponses.
15. Être hors sujet
En avançant hors-piste, tu es assuré de perdre ton public. Reste sur le thème durant toute l’introduction.
Les digressions ne sont pas de mise à ce moment-là du discours. En les multipliant, tu prends l’énorme risque de perdre la grande majorité de ton auditoire qui ne voudra pas s’efforcer de te suivre dans les méandres de ton éparpillement.
Dans le cadre de l’ouverture, le hors sujet est sévèrement sanctionné. Il entraîne immanquablement chez les auditeurs une confusion qui laisse place petit à petit à la déception, puis finalement à une désertion cérébrale assez proche de l’encéphalogramme plat.
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